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Rofeh peint.

Email: contact@rofeh.fr

Un tourbillon

  • By CATHERINE
  • 19 octobre 2018
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Un tourbillon

Un tourbillon de couleurs, chaleureux, exubérant. Puis le ballet coloré vous entraîne dans un parcours inattendu et contrasté. Les peintures récentes de Rofeh sont joyeuses et pourtant graves sombres et malgré tout lumineuses.

Rofeh s’amuse avec les genres et les matériaux. Il confond allègrement la toile et le vitrail. Il s’approprie la lumière là où elle pénètre le support et joue de sa transparence, calque ou verre qu’importe ! il fait en sorte que, dans leur traversée, là où elle se laisse saisir et capter à rebours, les rayons irradient la couleur, la portent à incandescence, la fasse ruisseler en cascades flamboyantes.

Qui pourrait s’étonner que Rofeh s’amuse à faire des livres …et qu’il les expose dans une librairie ? Connivences d’experts ? certainement pas. Plus vraisemblablement dialogue complice entre amoureux des mots et fou de couleurs. Pourtant les livres de Rofeh sont d’un genre particulier. Rofeh n’écrit pas de livres, n’en peint pas d’avantage.

De certains de ses livres on pourrait dire que Rofeh les traite comme s’ils étaient de pierre, destinées à devenir des édifices : ce sont des livres-stèles dressés, surgis du fond de nos mémoires, sévères, sombres et profonds comme les fôrets d’Europe. Je ne peux m’empêcher de voir dans ces livres debout mais titubants, la trace d’un passé tenace. Pourquoi cette image du vieux cimetière juif de Prague me revient-elle soudain ? Et lumineux pourtant…
Comment ne pas ressentir, parfois sur la même surface travaillée, cette vibration intense, propre aux pays du soleil, pays de l’enfance de Rofeh ou d’un autre « ailleurs » où la lumière est reine ? Livres dépositaires de nos passés, confidents de nos présents, messagers de nos espérances.

Ici Rofeh dispose ses livres tels des armées avançant en rangs inégaux mais serrés ; bataillons de phrases et de mots enfermés dans le secret de leurs pages noircies d’encre ; livres fatigués aussi, trop lourds, parce que trop chargés de textes, de pensées, couchés ou simplement penchés, dans l’attente qu’on les prenne, qu’on les ouvre, qu’on les lise.

Là, Rofeh se fait paysagiste : champs de livres semés à la volée, légers, légers, légers. Ces graines rares comme des perles précieuses déposées sur nos humeurs vagabondes brillent de leur mille mots… La récolte sera bonne, la rentrée littéraire aussi…

Chants de lettres, surfaces de songes, parchemins de mots qui s’envolent, virevoltent, font danser la toile. Rofeh se fait scribe, ses phrases cachées, enroulées, cantilées n’ont pas d’âge.

Livres déguisés en taches colorées, drapés dans leu clair-obscur. Leurs contenus se dérobent sous la transparence trompeuse des couches ajoutées. Pour les saisir, les déchiffrer, il faut partir à leur rencontre, savoir où aller les chercher : sur la toile ? Quelque part entre sa texture enfouie et la surface épaisse/ légère/ lisse/ rugueuse de la matière ? Dans la tête du peintre ?

C’est évidemment au docteur qu’il faut poser la question. A ce docteur inspiré, lumineux, généreux : généreux de son temps passé à écouter, guérir soulager ; généreux de son verbe, car il parle, parle, parle beaucoup, le docteur : généreux de ses pensées, ici mises en couleurs et en images qu’il nous invite à partager avec lui sans réserve à La Réserve.

Régine AZRIA
Hiver 2000