Des bruits de mon enfance méditerranéenne, je garde en mémoire le brouhaha des Koteb (école coranique), de l’Ecole, des synagogues de mon quartier. Leurs ondes chaudes et colorées y vibraient sur un rythme qui ne m’a jamais quitté. Elles ne cessent d’entrer en dialogue avec celles du Vexin.
« Rofeh » C’est ainsi que m’interpella le Vieux Monsieur de Vétheuil alors que je finissais de rédiger l’ordonnance. « Rofeh » (médecin en hébreu) je suis vieux, je suis malade et je vais mourir …et je n’ai pas de fils », il marqua un temps d’hésitation et insista « je vais mourir et je n’ai pas de fils … tu comprends bien ? »- « J’ai compris » le rassurais je en souriant. Lorsqu’il atteint ses cent vingt ans, je récitais le Kaddich sur sa tombe. Je lui rendis donc cet hommage filial en échange de quoi j’adoptais le nom de « Rofeh ».
Peindre pour un médecin et qui plus est à Vétheuil, peut être un hobby comme faire de la musique ou un défouloir comme la pratique du sport. Non, pour moi la peinture est espace de liberté, est liberté, elle me permet tout. J’ai l’impression que seule la peinture me permet d’étaler en temps réél, c’est à dire de façon tout à fait intemporelle et anarchique, ma culture, mon passé, mon métier, de passer sans transition des traditions orientales aux techniques et aux sciences les plus pointues. La peinture me permet d’inventer, de créer, rêver, fantasmer, délirer, ceci dans un ordre toujours parfait, c’est un dans un univers qui ne connaît ni temps ni espace que j’ai la prétention de patauger comme un canard ou de gambader comme un cabri ou encore onduler entre les dunes comme le chameau rouge.
En conformité avec l’esprit talmudique que je revendique, je rends hommage aux vénérables dont les génies habitent ces lieux, Monet, Mitchell, Riopelle. Ils sont présents. Longue vie à mes amis peintres : Hasegawa et François mon ami, Le maître !
La peinture est délice absolu, le sommet de mes préoccupations demeure le souci de mes patients.
Dans chacun de mes travaux, j’occupe tout l’espace, chacun de mes tableaux exprime exactement le contenu des précédents et des suivants, la célébration de la vie : la mienne et celle de l’Autre. Seule la langue d’expression varie…à l’infini.
Rofeh.