R’BARBIYA
Très jeune déjà vers sept huit ans peut-être, Maman ne sachant pas quoi faire de moi m’avait amené à une R’BARBIYA. Ma tante, la plus jeune des sœurs de ma mère, était lunatique disait-on. Tous les traitements essayés, c’est à dire traitements de bonne fame, y compris l’arme absolue : le traitement apparu dans un rêve, et on rêvait beaucoup, n’avaient pas fait preuve d’efficacité. A ce sujet Maman ou grand-mère avaient rêvé qu’un foie de poulet grillé aurait raison de la maladie de cette pauvre tante, aussitôt dit aussitôt fait, poulet égorgé, foie extrait et grillé, consommation à la banque sur le lieu de travail de la tata. Là encore rien ! Faire peur, surprendre en criant Ouh ! Faisait aussi partie de la panoplie. Là encore rien. Restait le désenvoutement autrement dit la R’BARBIYA.
Une R’BARBIYA ça s’organise. Il faut des musiciennes soudanaises, Tabla, portée à bout de bras pour donner le tempo, tambourin et un espèce de guide chant sur lequel la préposée pianotait toujours les mêmes notes sur un rythme toujours plus rapide.
Ce jour-là donc la R’BARBIYA est organisée pour désenvouter ma tante, j’accompagne ma mère. Avant que cela ne commence je confisque des gâteaux au miel et siffle goulument quelques verres de sirop de roses ultra sucré.
J’ai quoi ? peut-être huit ans.
Les musiciennes se mettent en place, au centre la Tabla, guide chant à droite et Tahar à gauche. On fait brûler du poil de chèvre pour commencer, ça pue le bouc comme on dit, on rajoute l’OUSAK (encens), la pièce commence à s’enfumer, la musique commence, toujours la même phrase en boucle sur un rythme qui devient très vite vertigineux, j’ai la trouille au début mais je reste dans la pièce et ne sors pas comme les quelques gamins qui choisissent d’aller jouer ailleurs.
Ma tante est littéralement traînée au centre de la pièce par d’autres femmes, elle est prostrée, au début on la bouge comme une marionnette, les autres femmes applaudissent poussent des youyous d’encouragement. Elle finit par remuer de ses propres moyens, très peu, à peine, d’autres femmes entrent dans la danse, la musique s’emballe, les femmes aussi, je n’en perds pas la moindre image, très vite la tante est en transes, les copines idem. Ma mère n’est pas dans le groupe, ça me soulage de pas la voir dans cet état. Elle est assise dans un coin discute. Les transes sont suivies d’évanouissement, rapidement pris en charge par les copines, on déploie la réanimation : des claques et un seau d’eau. Les claques d’abord puis carrément des seaux d’eau balancés à la figure des danseuses pour les ranimer ou peut-être régler des comptes. Au bout d’un moment les femmes ruissellent sous la sueur et la flotte. Les vêtements à moitié relevés ou carrément déchirés, collés sur leur peau dessinent parfaitement leur anatomie que je découvre avec intérêt. Je crois que pour la première fois de ma vie je fais la relation entre le tableau qui s’offre à mes yeux et l’érection qui tend mon short ! Sensation très agréable même à 8 ans ! Plus tard et en toute naïveté, chaque fois que je voyais une femme peu habillée je goûtais au même plaisir innocent, je me créais toutes les occasions de ce plaisir visuel, les voisines, la laveuse de linge qui se déshabillait pour laver le linge sur la terrasse de l’immeuble où nous habitions. Bien que nous fussions très pudiques à la maison, j’évitais de voir ma sœur ou ma mère si l’occasion se présentait, comment à huit ans sait on ?